Le ciel qui vous borde
À votre corps, ma sœur, passant d’amples limites,
à ce qui fut osé en tout dernier recours,
après les infortunes que connurent les vôtres
À ces chemins semés d’embûches et de tessons,
à ce corps éprouvé, fort, fragile et blessé,
qui n’aspire parfois qu’à une nuit sans fin
qui le reposerait.
À vos soifs sans refuge qui franchirent les os
de tant de pays gris où vos pas se perdirent,
dans l’espoir incertain de trouver un abri
où vos enfants enfin pourraient dormir en paix.
À l’eau de vos pensées qui souffre et s’évapore
à son lac épuisé qui ne ressemble plus
qu’à un creux asséché.
À ce qu’on vous suppose, à ce qu’on vous inflige,
à la peur insensée qui vous reçoit partout,
objecter que la vie n’a séparé personne
qu’être nés fait de nous des frères et que le temps
serait mieux employé à l’entraide et au chant
auquel vous aspirez, que nos poitrines hébergent,
ce sanctuaire de sang.
Aux merveilles détruites et à l’amour de tout
un guitariste joue sur sa guitare sans corde,
il parle à votre corps, à votre âme et au sang
qui palpite en vos mains lorsque vous les tendez.
Asseyez-vous ici, prenez cette amitié,
faites-en un abri, une table, une grotte,
où garder vos petits et reposer vos pieds,
sous le ciel qui vous borde.
Joëlle Soyer
